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Après les films, il restera le cinéma.

Cette année, alors que notre festival célèbre ses 10 ans, nous avons décidé de recentrer notre regard sur notre propre histoire. C’est peut-être le moment de faire un point, même subjectif, sur le cinéma qui nous a nourri et pour lequel nous avons si intensément travaillé durant toutes ces années.

La question principale de cette réflexion est la suivante : après le passage des films, que reste-t-il comme cinéma ? Placer les six films de cette section parallèle  au cœur de cet exercice n’est pas une façon de hiérarchiser nos choix, mais plutôt de vous offrir des indices sur les forces créatrices que nous percevons dans ce cinéma colombien, si varié et insaisissable.

La parole
La Colombie, pays doté d’une tradition orale très prégnante, compte aujourd’hui de nombreux cinéastes pour re-signifier et révéler la force de la parole. C’est pourquoi nous souhaitons souligner  la pertinence cinématographique d’œuvres comme Noche Herida (Nicolás Rincón Gille) et Solecito (Óscar Ruiz Navia), où l’importance de cette parole est au centre du récit. Soutenir le pouvoir du récit, c’est aussi proposer un autre regard politique sur une société pleine de contradictions. Ces deux films, grâce à leur douceur, leur humour et leur humanité, libèrent cette force pour la transformer en matière première du film.

La mémoire
Les réalisateurs César Alejandro Jaimes et Juan Pablo Polanco (Läpu) se souviennent de l’omniprésence de la mort dans les journaux télévisés en Colombie lorsqu’ils étaient enfants. Ce souvenir est aussi le nôtre et celui de tous les cinéastes de notre pays.

La représentation de la mort, et notamment de la mort violente, est une quête que nous avons accompagnée lors de ces dix ans de notre Panorama. Avec Läpu, nous célébrons ce cinéma délicat, magique et vital qui nous donne à voir l’invisible, et à regarder la mort d’une façon poétique et onirique. Avec cette œuvre, et toute la constellation de films qui ont proposé une approche de la mort en rupture avec le discours dominant, nous contribuons à construire une mémoire émancipatrice. C’est aussi ce processus de libération que nous avons accompagné et incarné lors de ces dix ans.

Le mouvement
Avec un parti-pris contemplatif, de nombreux films colombiens proposent une expérience sur le temps. Il s’agit à la fois d’un temps pour observer, d’un temps pour écouter ou encore, comme dans le cas de Corta (Felipe Guerrero), le temps d’un acte filmé. S’attachant à une observation minutieuse du corps, de son travail dans les champs et de son rendu sur l’écran, Corta nous immerge dans un rythme, un mouvement, une vibration, qui entre en résonance avec un territoire.

Nous avons accompagné des cinéastes qui ont pris le temps de capter l’écho d’une géographie et qui ont relevé le défi de proposer de nouvelles représentations. Ce cinéma nous invite à une exploration d’un pays riche en images. Il nous donne envie de faire partie de cette transformation.

La quête
La sensualité et le mystère de La Máxima longitud de un puente (Simón Vélez) et Bicentenario (Pablo Álvarez Mesa) sont des fenêtres sur un terrain cinématographique rempli des forces et des tensions qui parlent du monde. Dans ces films, la croyance, l’invocation mystique et la mémoire collective sont les pièces d’une même mosaïque. Le travail méticuleux et sensible des cinéastes qui redonnent vie aux archives est plus que nécessaire dans un pays en pleine reconstruction.

Nous nous sommes profondément identifiés à l’énergie de cette quête. Il est fondamental de donner des perspectives à notre histoire officielle, de représenter la liberté et l’irrévérence de la jeunesse ainsi que d’ interroger incessamment son rapport au monde.

Après les films, il restera, en somme, le cinéma.

(Bíbata Uribe)

Un film de

Felipe Guerrero

Colombie, Argentine, France | 2012 | 69′

10.10.22

Un film de

César Alejandro Jaimes et Juan Pablo Polanco

Colombie | 2019 | 76’

07.10.22

Un film de

Óscar Ruiz Navia

Colombie, Denmark, France | 2013 | 20'

09.10.22